Face à la barbarie

Publié le par Mohamed FELLAH

L’assassinat dans des conditions abjectes de notre compatriote Hervé Gourdel a littéralement glacé l’ensemble du pays et provoqué une colère rarement ressentie à l’échelle de la France. Ces agissements inqualifiables dépassent l’entendement, et défient toute tentative d’explication rationnelle, tant nous sommes au-delà de l’horreur. Tareq Oubrou, recteur de la mosquée de Bordeaux, a bien résumé la situation en évoquant les criminels, qu’il n’hésite pas à qualifier de « cas psychiatriques », et en soulignant que « même les animaux ne se comportent pas de cette manière ».

Je me sens à titre personnel doublement concerné par ce triste événement.

Je suis blessé en tant que musulman. Le fait que des criminels habillent leurs atrocités d’une grande religion pour les justifier m’ulcère, comme il révolte plus d’un milliard et demi de musulmans à travers la planète.

Je sais que la communauté musulmane est divisée sur l’idée de se manifester pour dénoncer la barbarie au nom de notre religion, et je comprends qu’une partie ne veuille pas le faire, car considérant que la condamnation doit dépasser le simple cercle communautaire. Cette position se vérifie en théorie, car « tout acte inhumain doit être condamné par l’humanité ». Mais en théorie seulement…

Car la réalité nous rappelle que la tentation de verser dans l’amalgame est réelle chez nombre de nos compatriotes. Face à cet état de fait, il est possible effectivement de nier le phénomène en refusant de le regarder en face, ou même de le minimiser. Mais je crois, qu’en cette période de trouble, il est de la responsabilité des musulmans de souligner à quel point ni eux ni la religion qu’ils pratiquent pacifiquement (étymologiquement islam signifie paix) n’ont à voir avec ce type d’atrocités.

Et il faut par la même occasion envoyer un message clair aux criminels : « Nous (musulmans) sommes des sales français ! » et vous nous trouverez sur votre chemin pour empêcher que de nouvelles ignominies se reproduisent ici ou ailleurs au nom de notre religion.

Je me sens ensuite responsabilisé en tant que citoyen français car c’est bien un des nôtres, un compatriote français, qui a été lâchement assassiné. Que pouvons-nous faire face à la barbarie ? De quelles armes disposons-nous ?

Nous devons d’abord faire bloc et démontrer notre unité quand la Civilisation est attaquée dans ses fondements. Et le faire en transcendant nos appartenances, nos histoires ou même nos sensibilités politiques tout en rappelant des principes universels simples et précieux.

Nous pouvons et devons continuer à développer des espaces de dialogue dans lesquels chaque citoyen pourra trouver réponses à ses questions, apprendre à connaître l’autre et confronter des points de vue tout en respectant les règles élémentaires du débat. Chaque espace favorisant l’échange étant, à mon sens, un sas de décompression qui permet de désamorcer les tensions qui peuvent mettre en danger la cohésion nationale. Ce travail de fourmi et de terrain, très peu médiatisé mais réel, ne serait-ce qu’à l’échelle d’Agen, doit devenir un chantier prioritaire pour celles et ceux qui veulent entretenir le vivre ensemble sur notre sol.

Les résultats de ce travail de fond ne seront peut-être pas visibles à l’horizon d’une ou deux générations, et les contemporains n’en ressentiront peut-être même pas les effets à court terme. Mais c’est une exigence que nous devons avoir vis-à-vis de nous-mêmes et un devoir que nous avons envers nos enfants, qui eux auront le droit de nous en vouloir de ne pas avoir pris nos responsabilités.

Face à la barbarie
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S
J'apprécie votre blog , je me permet donc de poser un lien vers le mien .. n'hésitez pas à le visiter. <br /> <br /> Cordialement
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T
Merci très beaucoup pour cet article. Sympa.
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